Déluge
Je suis noyé sous la pluie, enlisé dans la boue et évadé devant un tandoori.
Je suis prisonnier de la station thermale de Khirganga, survivant à trois jours de pluie qui n'arrête jamais.
Le village est uniquement composé de cabanes de bois alignées autour d'un axe principal boueux et descendant (ou montant selon la perspective). Au sommet, les bains, tempérés à partir de l'eau des sources chaudes et de celles de la pluie ou de la rivière. On s'y lave et on s'y repose. Il n'y a rien d'autre à faire. Après quatre heures de marche en montagne pour s'y rendre, on est particulièrement heureux de s'y reposer. Après trois jours de pluies diluviennes (il a tombé des clous tout le long), on s'y repose par dépit. C'est ça ou le tandoori.
On aurait voulu redescendre mais c'est trop boueux, de nouvelles chutes apparaissent à tous les jours, l'eau en surplus doit bien redescendre de la montagne à quelque part. Elle s'invente de nouveaux chemins.
Seule option, attendre. Je reste là, longuement submergé dans l'eau naturellement chaude, presque brûlante, à regarder les nuages passer devant moi, à la hauteur de mes yeux. Ils courent se perdre et se déverser au creux des montagnes, voilant un moment le torrent qui dévale les pentes escarpées et découvrant ensuite ces sapins énormes qui, à des hauteurs vertigineuses, peinent de leurs racines à garder le sol boueux en un seul et unique morceau.
C'est ce que j'aurai à affronter en partant d'ici.
Pour le moment, je reste au chaud devant mon tandoori.
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