jeudi 28 août 2008

Toit du monde

Difficile de donner des nouvelles sur le toit du monde. Impossible de mettre des photos; on rationne internet par ici.

De toute façon, les photos ne sauraient décrire la grandeur des paysages tout autour de moi. Des crêtes lunaires immenses en haut desquelles sont perchés stupas et gompa. À leurs pieds, une vallée verdoyante, des feuillus éffilés, dressés vers le ciel. Des sommets enneigés à partir desquels coulent des sources qui viennent nous irriguer.

J'ai eu le souffle coupé, pas seulement par émerveillement, mais aussi par altitude. Incapable de faire plus de dix pas sans me sentir à court d'oxygène. J'ai l'impression que c'est pas la même altitude qu'à Mexico même si, en terme de mètres, les deux s'équivalent. Ici c'est une altitude vénérable, parce que tout semble vouer à cette vénération. Ça monte, monte et monte encore. La construction horizontale, ils ne connaissent pas. Les lieux saints sont hissés aux sommets ou aux pentes des montagnes, juste pour célébrer l'altitude. Les vieux quartiers ou les chemins qui y mènent montent par escaliers, amas de roches, terre battue en zigzag. Tout cherche à s'élever dans ce coin du monde, du petit moine qui traîne des seaux à plein les bras d'un bout à l'autre de sa gompa jusqu'aux gigantesques statues de bouddha. Tout le monde monte sans perdre le souffle, du matin au soir, dans la plus naturelle des vénérations.

Des photos s'en viennent dès que je peux les mettre en ligne.

jeudi 21 août 2008

Moments d'incompréhension #3

Le marchand, il fait une puja en allumant ses néons le soir quand il commence à faire noir. Y en a un qui clignotait, le marchand s'est gratté la tête, il a refait une prière et le néon s'est finalement allumé comme du monde. Alors le marchand sort dehors, se joint les mains et remercie les dieux tout-puissants d'avoir allumé tous ses néons.


Moments d'incompréhension #2

Quand on commence à voir des monstres dans les motifs de sacs baba-cool, c'est signe qu'on respire trop de pollution je crois.



Trouvez la face de monstre.

C'est pas si pire...

... Delhi. Y en a pour dire que c'est l'enfer. Que c'est une fournaise. Que ça déborde de malfaiteurs et de misère - et que ça pue en plus. Y en a qui rentrent chez eux après 24 heures.
Il y a quelque chose de dépaysant à voir les gens dormir sur le côté des rues, au milieu des meutes de chien, des vaches qui déambulent et des déchets de la journée, c'est vrai. Mais ça ressemble assez aux bas-fonds brésiliens et mexicains. C'est juste un peu plus étendu et omniprésent.

C'est pas si pire l'odeur de merde et d'urine, surtout que c'est assez souvent étouffé sous les effluves des pots d'échappement, celles des bâtons d'encens brûlés sur les étals et aux abords des temples et celle des braseros ou des diverses fritures qui y sont cuisinées.
C'est pas si pire non plus les rabatteurs et autres arnaqueurs, y en a pas tant que ça. Y a pas mal de mendiants aussi, et de lépreux, ou les deux en même temps. Et quand les enfants acrobates débarquent et qu'ils font les saltimbanques devant les touristes qui marchent, l'un jouant du tambour maquillé avec une moustache en cire noire, l'autre se démembrant pour passer au travers d'un anneau et le dernier faisant des culbutes comme au Cirque du Soleil, y a pas à dire, les rabatteurs, c'est comme si on les voyait pas.

Je n'ai pas encore le choc culturel tant appréhendé mais j'ai quand même l'impression d'être sur une autre planète.

Moments d'incompréhension #1

Je n'aurais jamais cru qu'il existe autant de bruits de klaxon différents en ce bas monde. Moi j'en connaissais qu'une sorte. Ici, il y en a même un qui fait le cri du lynx je crois!

Arnaque #1 (pas que je m'attends à en avoir d'autres mais...)

Deux heures du matin, aéroport de Delhi. Il fait chaud, les vêtements collent à la peau et ça laisse des marques sous les bretelles du sac à dos. Le décalage horaire pèse, près de 13 heures de voyage, 9 de décalage. L'impression d'avoir sauté les 24 dernières heures de ma vie (et c'est le cas d'ailleurs). Le regard hagard, épuisé, l'air complètement gaga, je suis debout devant le guichet de taxis pré-payés de Delhi depuis un bon quinze minutes. La parfaite mise en scène pour une première arnaque.

L'indien arrive et passe par derrière la petite boîte pour entrer dans son cabinet. Après les questions usuelles, il annonce le tarif pour le trajet jusqu'à Pahar Ganj (Main Bazar) : 300 roupies.
Les poches chargées de billets de 500 (les gars du bureau de change sont probablement de connivence), je le lui en remets un pour effectuer le paiement.
Assis derrière le comptoir, sur un tabouret, il affiche un visage d'enfant qui s'apprête à jouer un mauvais coup et qui se demande si on va l'attraper.
Il laisse tomber rapidement le billet de banque sur ses genoux et me montre un billet de 100 roupies.

"I said three hundred rupeeeeeees sir!"

Minute bonhomme, tu me la fais pas à moi celle-là, je l'ai lue dans le Routard celle-là, et dans le Lonely Planet aussi et sur plein de forums encore!
Enfin, on a beau s'y attendre, savoir que l'arnaque existe, le vivre c'est une autre paire de manches. On doute pareil, on se demande pareil si on s'est pas trompé parce que dans le fond on a pas vraiment vérifié si c'était un billet de 500 roupies et que vingt minutes plus tôt on avait jamais vu ça de sa vie ce genre de billet-là.

"I gave you five hundred rupees, i'm pretty sure"

Le voilà qui dodeline de la tête à tout va. Il veut dire à la fois oui et non. Il est visiblement mal à l'aise et partagé entre l'idée de ne pas perdre la face et celle d'avoir été pris en flagrant délit. Il choisit comme solution de faire comme si rien n'était, comme s'il ne s'était jamais rien produit.
Il me tend alors le change correct, un peu dépité.

Et c'est à ce moment-là que le désir de justice se réveille. Je peux prendre les deux billets ou m'indigner.
Je peux me taire ou porter plainte.
Je peux laisser l'arnaque se reproduire avec un voyageur moins avisé ou m'insurger.
Je peux cautionner ou faire renvoyer le guichetier véreux.
Je peux partir ou mettre de l'ordre dans les taxis pré-payés de l'aéroport de Delhi.
Je DOIS appeler la police!

Je sais pas si c'est la fatigue ou si c'est le logo de la "Delhi Traffic Police Pre-Paid Taxi Service" - "WE WANT YOU SAFE" qui m'a découragé mais j'ai pris l'argent et j'ai dit merci.

mardi 19 août 2008

Aaj... (à lire tête en bas)

Hypnotisé par la roue du samsāra indien.
Dans une suite interminable de Om Mani Padme Hum.

Et faire tourner les moulins à prières.
Pour saluer un petit lama dans sa gompa.
Accrochés à des falaises escarpées.
Grimper jusqu'à des monastères millénaires.

Et l'inviter à boire un po cha.
Faire connaissance.
Tomber nez à nez avec un yak.

Où déguster des momos à la vapeur.
À la recherche d'un boui-boui fumant.
Y creuser mon chemin.
Poser pied dans les vallées de la montagne.

Et voir l'Himalaya dans un hublot.
Pour un aller-simple à l'aéroport.
Réveiller un rickshaw-wallah.

Et dégoter de quoi m'habiller.
Me perdant dans un capharnaüm d'étoffes et de guenilles.
Pour trouver un bazar.

Et y plonger.
Contempler le chaos.
Écarter volets et rideaux.

Qui me réveillera quelques heures plus tard.
Devant un temple consacré à Shiva.
Pour 300 roupies (7 dollars).
Je vais trouver un hôtel à Paharganj au milieu de la nuit.

Et le boire.
À un chāi-wallah sur le coin d'une rue.
Acheter un chāi pour trois roupies (7 sous).

Me servir de l'autre pour autre chose.
Avec une main. La droite.

Avec les mains.
Prendre une lampée de dal.
Porter à ma bouche un morceau de chapati.
Je vais manger un thali.