Histoires ferroviaires 1
Je suis évaché contre mon sac sur le carrelage poussiéreux de la gare ferroviaire de Haridwar. Des écales d'arachides traînent à côté de moi. Je me sens au zoo. Un peu comme au Parc Safari où les animaux sont en liberté. Ou alors comme dans un cirque où je serais l'animal de foire.
Venez! Venez voir l'incroyable géant blanc somnoler sur sa maison-carapace bleue! Ne manquez pas ses amis, le saddhu anglais aux étonnants rastas blonds, le stupéfiant ogre au crâne luisant et les trois langoureuses femmes fumantes légèrement habillées!
Les indiens défilent devant nous comme devant une cage. Ils s'arrêtent et nous dévisagent longuement. La plupart prennent des photos avec leur cellulaire, d'autres ont de véritables appareils et nous demandent de poser en leur compagnie. Certains font comme s'ils étaient devant le Taj Mahal : s'installent debout à côté de nous avec leur famille et sourient pendant qu'un ami les prend en photo.
Parfois un indien jette un regard indécent en direction de Mor, de Sarah ou de Karine, les fixant libidineusement, les mains entre les jambes, en se frottant impunément les parties génitales dans leurs jeans trops serrés. Je les fixe à mon tour droit dans les yeux, fronce les sourcils et ils décampent la queue entre les jambes, honteux d'avoir désiré la femme d'un autre.
Nous sommes des monuments, des curiosités, des animaux étranges, l'objet d'envies perfides et de regards vicieux, de sourires amusés et de rires moqueurs, de sourcils d'incompréhension et de visages indignés.
La gare entière tourne autour de nous, c'est une longue procession, les familles indiennes viennent y terminer leurs vacances après deux semaines de célébrations religieuses. Nous sommes la dernière attraction de leur visite, assis là, simplement à attendre notre train.
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